La municipalité actuelle de Saint-Marcel-de-Richelieu occupe le gros du territoire de ce qui était le fief Saint-Charles de la seigneurie de Massue, plus tardivement devenue, du côté est de la rivière Yamaska. Ce fief se trouvait à être la 347e concession faite en 1701 par la Nouvelle-France, alors sous le règne du roi Louis XIV, au profit de René Fezeret qui le cède en 1720 à son petit-fils, Charles-Henri de Thiersant qui y fait construire maison, en 1723, et moulin à scie, en 1725.
De cette époque coloniale, on ne trouve plus aucune trace autre que les vieux manuscrits qui en font état. Les premiers établissements français sont disparus par suite des guerres avec les tribus autochtones et les conquérants anglais à qui les gens vendent, après coup, leurs biens pour des sommes dérisoires, écrit-on dans les manuels faisant le récit de cette époque trouble de notre histoire locale.
La seigneurie passe aux mains de George Jackson en 1764 puis est vendue aux enchères en 1772. C’est le major Thomas Barrow de l’armée anglaise qui en prend alors possession et qui y fait construire un moulin à farine, peu de temps après, sur la rive droite de la rivière Yamaska. En 1780, le fief de Saint-Charles est légué avec d’autres au fils Thomas James Barrow qui, vivant surtout à New-York, les vend à sa londonienne de mère, en 1789, pour les reprendre au décès de cette dernière, en 1807.
Pour beaucoup, c’est après l’ouverture du pont à Yamaska, vers 1833, que des chemins s’ouvrent dans le fief de Saint-Charles et que se fait la prise de possession des terres. C’est à cette même période que le fief est vendu au sieur Aimé Massue qui en devient le seigneur et qui en confie l’administration à son fils Gaspard Aimé, en 1835. La concession et la colonisation des terres vont bon train avec la construction de nouveaux chemins de pénétration des terres.
La manière de disposer des terres en concessions (ou rangs) avec des lots étroits de 1, 2 ou 3 arpents de largeur et de 30 arpents ou 80 chaînes en longueur demeure même après l’abolition du régime seigneurial survenue en 1854 et a longtemps conditionné leur mode de tenure. Cela est resté vrai jusqu’à assez récemment pour les limites des propriétés, pour la conduite des travaux aux champs, pour la contention du bétail dans des milieux clôturés, pour le chemin de ferme bordé d’arbres et d’arbustes qui menait au bout de la terre et pour l’évacuation des eaux de surplus via des raies de curage et des fossés de lignes qui encadraient alors les parcelles de terres vouées aux céréales, au foin, au pâturage, à des cultures maraîchères ou autres, avant de déboucher aux petits ou grands ruisseaux qui sillonnaient le territoire local.
Les conditions des premiers chemins de colonisation étant souvent très difficiles, les gens qui se sont installés dans le coin de pays de ce qui deviendra Saint-Marcel plus tard peinent à se rendre à l’église de Saint-Aimé, de l’autre côté de la rivière, pour assister aux offices religieux. Ces personnes demandent aux autorités religieuses du temps que leur portion de territoire soit plutôt rattachée à Saint-Hugues. Ça n’a pas eu l’heur de plaire au curé de Saint-Aimé et ça aurait passablement tergiversé sur la chose, du côté de l’archevêché et de monseigneur Bourget, évêque de Montréal.
En 1844, les habitants de nos lieux présentent une demande à Mgr Bourget pour la création d’une paroisse distincte invoquant la grande difficulté de traverser la rivière au printemps et à l’automne, en période de crue des eaux, ainsi que la grande difficulté de descendre, d’un côté, et de remonter, de l’autre côté, les talus des berges de la Yamaska. C’est vrai pour les messes du dimanche et plus encore pour les messes de Pâques et de Noël, c’est vrai pour le baptême des nouveaux nés et c’est vrai également pour les funérailles des défunts, fait-on savoir dans la pétition signée par 62 propriétaires qui ont peut-être essayé la chose en portant un cercueil et son occupant. Allez savoir!
Dans les faits, ce n’est qu’en 1852 que, pour l’Église catholique et ses ouailles, la paroisse catholique de Saint-Marcel voit officiellement le jour dans le très nouveau diocèse de Saint-Hyacinthe placé sous l’autorité ecclésiastique de l’archevêché de Montréal. Le nom a été choisi pour commémorer la vie d’un pape mort en l’an 309 qui aurait été forcé de devenir palefrenier dans une église transformée en écurie, par la volonté de l’empereur romain Maxence, selon la légende qui en est faite.
Tel que mentionné ci-haut, la paroisse canonique de Saint-Marcel a été érigée en 1852. La proclamation de la création de la municipalité par le gouvernement de la «Province of Canada» remonte au 1er septembre 1853, tel que spécifié dans l’édition du 3 septembre 1853 de la très officielle «The Canada Gazette». C’était peu de temps avant que le territoire soit municipalisé en 1855, civilement parlant, comme ce fut le cas pour beaucoup de paroisses du Québec, cette année-là, avec l’entrée en vigueur du chapitre 100, 18 Victoria, des lois du Canada de l’époque.
Cependant, ce n’est qu’en fin d’année 1988, pour souligner son appartenance passée à l’ancien comté municipal de Richelieu, que la Commission de toponymie du Québec enregistre officiellement le nom de Saint-Marcel-de-Richelieu qui ne servait jusque-là qu’à des fins de poste locale depuis 1890, mais que la municipalité utilisait déjà depuis bon nombre d’années dans ses affaires courantes pour se différencier de l’autre municipalité portant le nom de Saint-Marcel, dans le comté de l’Islet.
Au tout début des années 1980, la municipalité a choisi de faire partie intégrante de la municipalité régionale de comté des Maskoutains, par volonté de sa population. En effet, nos gens entretiennent désormais plus de liens d’affaires commerciales et d’emploi avec la ville de Saint-Hyacinthe comme pôle régional que ce peut être le cas avec la ville de Sorel comme ancien chef-lieu de comté.
On ne peut nier que l’ajout du «de-Richelieu» porte beaucoup de gens à croire que nous nous situons quelque part le long de la rivière Richelieu. Cependant, rien n’est plus faux puisque la frontière ouest de notre municipalité est la rivière Yamaska à l’intérieur du bassin versant de laquelle le territoire municipal se trouve complètement compris. Et c’est dans ce territoire qui est le nôtre que l’agriculture est pratiquée depuis toujours sur des terres comptant par les plus belles et les plus fertiles du Québec.